mercredi 14 avril 2010

Enquête à Caen concernant les Le Fournier, 1551


Enquête ouverte à Caen, le 13 janvier 1551. Détails historiques recueillis en cette enquête.

 
Aux termes de lettres-patentes octroyées à Rouen, en octobre 1550, en faveur de Robert Le Fournier, baron de Tournebut, de Lucas du Chemyn, son neveu, et de plusieurs de leurs parents et alliés, les baillis d’Orléans, de Blois, de Chaumont en Bassigny et de Caen, par ordre des gens des comptes du roi, ouvrirent, en l’année 1554, des enquêtes à l’effet de savoir si les membres de cette famille étaient réellement issus de la lignée de la Pucelle, et s’ils avaient droit aux privilèges et immunités nobiliaires concédés par Charles VII à Jeanne d’Arc et aux siens.

Le but de ces actes de notoriété est donc essentiellement privé, et une notable partie des dépositions, relative à la filiation des requérants, est sans intérêt historique. Il est toutefois possible d"y recueillir quelques utiles renseignements sur la parenté de Jeanne d’Arc.

Le premier article du questionnaire, inscrit en tête du procès-verbal de Caen, indique à la fois l’objet de l'information et quelques-unes des inexactitudes qui déjà s’étaient accréditées.

Cette enquête est complètement inédite. Une expédition authentique, aujourd'hui possédée par M. de Maleissye, fut levée par Charles du Lis, qui ne crut pas devoir en faire usage en son Traité sommaire. Il sera demandé aux déposants : " S’ils cognoissent ou ont pas ouy dire que de Jean d’Ay, prévôt d’Orléans (sic), frère de Jeanne d’Ay, [est issue une fille] qui, depuis, fut mariée à Jean de Villebresme, notaire et secrétaire du roy, et dudit Jean sorty autre Jean, semblablement notaire et secrétaire du roy, et conseiller de Loys, duc d'Orléans, du depuis roy, et, dudit Jean, M. François de Villebresme, recepveur et conseiller de Loys, duc d’Orléans, du depuis Loys, roy, douzième de ce nom, et si dudit François de Villebresme et de damoiselle Jehanne Brachet n'est pas issue damoiselle Marie de Villebresme, mariée avec Jacques Le Fournier, escuyer, sieur de Villambray ... ".

Les autres articles du questionnaire ont trait à la filiation des membres de la famille Le Fournier et à la condition, depuis quelque temps exigée, d’avoir toujours vécu noblement.

L’enquête de Caen fut, le 13 janvier 1551, ouverte en cette ville, où demeuraient la plupart des membres de la famille. Pierre André, écuyer, licencié en droit, lieutenant général au bailliage, recevait les dépositions. Vingt témoins furent entendus ; tous s’accordèrent à déposer qu’ils avaient personnellement connu Jacques Le Fournier, receveur des tailles à Caen, père et aïeul des requérants, et damoiselle Marie de Villebresme, son épouse. Marie de Villebresme, ajoutèrent-ils, née à Orléans, appartenait à une noble famille de cette ville, et, selon l’opinion générale, elle était de la lignée de Jehanne d’Ay, Pucelle d’Orléans, anoblie par Charles VII. La plupart se firent toutefois un devoir de dire qu’ils ignoraient personnellement de quelle manière et à quel degré s’établissait cette parenté. Aucune justification, en effet, n’est par eux produite, à l’appui de leur affirmation.

Mais, des vingt témoins entendus, pas un, je l’ai déjà remarqué, ne dépose que Marie de Villebresme ait eu pour mère une Catherine du Lis, fille de messire Pierre, dont il n’est pas même question dans l’enquête.

Les uns, conformément au questionnaire présenté par la famille Le Fournier, déclarent que Marie de Villebresme était fille de François de Villebresme, receveur du domaine, et de damoiselle Jehanne Brachet ; d’autres, en termes moins précis, qu’elle était réputée avoir pour aïeul un Jean ou Louis de Villebresme, attaché à la maison d’Orléans, lequel aurait épousé une Jehanne d’Ay, fille de Jehan d’Ay, frère de la Pucelle ... etc.

Tous, d’ailleurs, racontent que les requérants ont toujours vécu noblement, qu’ils possèdent de grands biens, ont chiens, chevaux et oiseaux de chasse, et vivent en relations habituelles avec la noblesse du pays, déclarations que, par suite des nouvelles exigences, nous retrouverons constamment dans les informations ultérieures.

Trois faits relatifs à la famille de Jeanne d’Arc ressortent donc des dépositions inscrites au procès-verbal de Caen.

En premier lieu, l’affirmation unanime, bien que dénuée de preuves, d’une alliance de la famille de Villebresme, attachée à la maison d’Orléans, avec une nièce de la Pucelle, généralement désignée par les témoins comme fille de Jean, prévôt de Vaucouleurs.

En second lieu, la tacite, mais formelle rectification de la tradition, accréditée par Charles du Lis, qu’une fille de messire Pierre, nommée Catherine, aurait épousé un François de Villebresme, receveur du domaine à Orléans, et serait mère de Marie de Villebresme, femme de Jacques Le Fournier. Les vingt déposants à l’enquête faite sous les yeux de la famille Le Fournier, et les Le Fournier eux-mêmes dans leur questionnaire, gardent un silence absolu sur cette Catherine du Lis, et attribuent à Marie de Villebresme une autre origine.

En troisième lieu, l’altération dans les dépositions des témoins, et jusque dans le questionnaire, du nom de du Lis, constamment écrit sous la forme Day, même quand il s'agit de la Pucelle. Cette altération n’est pas spéciale en pays normand ; nous la retrouverons dans des enquêtes ultérieures, faites en des contrées différentes.

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